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Les attaches-tu, tes souliers?

Par Geneviève Cusson, orthopédagogue M.A. et Laurence Chouinard, Ergothérapeute

Chronique orthopédagogique Mystère et boule de gomme, Ski-se-Dit, janvier 2022

Un enfant d’âge scolaire qui ne lace pas ses souliers vous semble-t-il paresseux? Et que dire de celui qui n’utilise pas ses ustensiles pour manger, mal éduqué? Et le grand qui demande encore de l’aide pour mettre ses mitaines, gâté? Contrairement à ces pensées populaires, la paresse est rarement une explication à ces comportements. Parmi diverses causes possibles, l’une d’entre elles est le méconnu trouble développemental de la coordination (TDC) qui affecte pourtant près de 5% des enfants d’âge scolaire, soit un enfant par classe. Le trouble développemental de la coordination consiste en un retard des apprentissages moteurs et de la coordination des mouvements qui nuit à la réalisation de tâches courantes, comme lacer ses souliers ou attacher un bouton. Cela affecte aussi l’organisation spatiale et temporelle nécessaire pour ranger des objets ou suivre une routine. 

Lorsqu’on regarde le jeune enfant qui fait ses premières boucles, nous observons à quel point cet exercice exige une grande concentration. Il analyse chacun des gestes, les exécute et se réajuste. Après quelques répétitions des gestes dans l’ordre, l’enfant devient de plus en plus habile à lacer ses souliers. Dès lors, l’enfant peut attacher ses souliers tout en discutant avec nous. En contrepartie, le cerveau de l’enfant atteint du trouble développemental de la coordination n’automatise pas les gestes moteurs. Malgré de nombreuses pratiques, chaque boucle à faire est perçue comme une première expérience! Le cerveau peine à coordonner les mouvements, à les mémoriser dans l’ordre et à en donner la commande. En conséquence, les membres les exécutent avec maladresse et inefficacité. Bien que ce trouble persiste dans le temps, l’adulte arrivera à exécuter une nouvelle activité motrice, comme conduire une voiture, avec beaucoup, beaucoup de pratique. Ces individus sont souvent de vrais Gaston Lagaffe!

Le trouble développemental de la coordination affecte d’ailleurs l’ensemble des habiletés motrices, dont celles nécessaires aux diverses activités sportives. Apprendre à faire du vélo ou à se tenir sur des patins est un exercice très ardu pour l’individu dont la coordination motrice est déficiente. Viser et lancer un ballon en contexte de jeu d’équipe peut faire vivre bien des déceptions. Ce sont souvent eux les derniers choisis dans les sports d’équipe. Les personnes atteintes de ce trouble sont d’ailleurs souvent sédentaires.

Les apprentissages scolaires en sont tout aussi affectés : tenir un crayon, découper, utiliser une règle nécessite énergie et concentration. La calligraphie est d’ailleurs une activité ardue : l’enfant doit s’arrêter et réfléchir à tracer chaque lettre, tout en tenant inefficacement son crayon. Il reste malheureusement peu d’énergie cognitive pour réfléchir à l’orthographe et aux idées. Ces enfants remettent souvent des textes très courts dont les mots se répètent. Si on leur posait les questions d’examen oralement, nous verrions qu’ils en savent beaucoup plus que ce que leurs écrits laissent paraitre.

Enfin, comme le trouble du développement de la coordination demeure peu connu, nous, parents et éducateurs, nous attendons à ce que l’enfant atteint réalise efficacement et rapidement les tâches courantes au même titre que les autres. De telles attentes, quoique bien intentionnées, donnent lieu à de nombreuses situations d’échec parfois accompagnées commentaires susceptibles d’atteindre leur estime. Afin de réduire l’exposition aux échecs, certains enfants deviennent alors moins empreints à jouer dehors, à faire des activités sportives ou des bricolages. Bref, ils se privent d’activités motrices pourtant doublement essentielles à leur développement moteur. 

Pour soutenir ces enfants, on s’arme de patience et on leur donne le temps nécessaire de réussir. Pour les aider à s’organiser dans le temps et dans l’espace, on doit parfois adapter leur environnement à leurs capacités. Alors, plutôt que de croire qu’avec plus d’entrainement, ils laceront enfin leurs souliers comme les autres, plutôt que de leur lancer « les attaches-tu, tes souliers? », pourquoi ne pas leur offrir des souliers à velcro? Ils pourraient ainsi aller plus rapidement jouer dehors avec leurs amis et stimuler leurs habiletés motrices.

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À propos de Geneviève Cusson

Orthopédagogue M.A. et directrice générale chez Futé

Une véritable passionnée de pédagogie et d’orthopédagogie! En fondant Futé, cette orthopédagogue d’expérience veut partager sa passion, son expertise et ses connaissances pour rehausser le niveau de littératie et augmenter la réussite scolaire.

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