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Avoir le mot sur le bout de la langue : une difficulté d’accès lexical

Par Geneviève Cusson, Orthopédagogue M.A. et Geneviève Chénier, M.Sc.S. Orthophoniste

Chronique orthopédagogique Mystère et boule de gomme, Ski-se-Dit, septembre 2021

Avoir le mot sur le bout de la langue : une difficulté d’accès lexical

L’accès lexical, ça vous dit quelque chose ? Il s’agit d’un bien grand mot pour un phénomène que nous vivons tous à chaque instant.  L’accès lexical est le chemin emprunté dans notre cerveau pour trouver les mots que nous souhaitons dire, voire même ceux que nous pensons. C’est notre capacité à accéder aux mots que nous connaissons, ceux utilisés couramment comme ceux enfouis dans notre mémoire. C’est donc dire qu’à chacune de nos pensées et paroles, nous empruntons le chemin de l’accès lexical. 

 

Parallèlement, nous avons tous aussi expérimenté une difficulté d’accès lexical. Vous savez, cette forte sensation de connaitre le mot et d’être incapable de le récupérer en mémoire. Avoir ce qu’on appelle communément “ le mot sur le bout de la langue ”. Comme si notre cerveau ne retrouvait pas le chemin qui mène au mot que nous cherchons, empruntant les diverses routes de nos souvenirs et expériences… en vain ! Une difficulté d’accès lexical s’avère parfois même collective où, malgré nos têtes rassemblées, nous n’arrivons pas à retrouver le mot recherché. Quelle frustration ! Quelle rigolade !

 

Vivre ce phénomène de temps à autre entraîne bien peu de conséquences dans notre quotidien. Cependant, pour les individus qui vivent avec un trouble d’accès lexical, la recherche des mots est hautement plus fréquente que pour les individus en général. Je me souviens d’une élève pour qui nous soupçonnons un trouble développemental du langage ou une légère déficience intellectuelle, alors que les évaluations neuropsychologiques ont révélé une intelligence normale, mais un trouble d’accès lexical d’une très grande sévérité. Il va sans dire que ce trouble peut affecter l’autonomie fonctionnelle d’un individu. Dans le cas de cette élève, le trouble est dit  développemental. Il peut aussi être acquis des suites d’un accident cérébral par exemple ou neurodégénératif. Enfin, des individus de tous âges peuvent en être affectés.

 

Un trouble d’accès lexical affecte principalement la communication, et ce, de manière fréquente et constante. Ses manifestations ne sont pas circonstancielles, liées à la fatigue par exemple. Les individus atteints peuvent manifester un délai fréquent avant de nommer un objet ou une personne, faire de trop nombreuses pauses ou répéter certains mots. Ce délai s’agit du temps occasionné par la course aux mots parmi les multiples chemins de la mémoire. Ces individus utilisent trop fréquemment des mots indéfinis tels que « truc », “chose” ou “affaire” pour nommer des objets relativement communs. Pour pallier l’absence de mots, ils miment et décrivent l’objet ou l’action plutôt que de nommer. Par exemple, ils utilisent  » c’est la fille, la fille qui coupe les cheveux ” plutôt que de dire “ coiffeuse ”. Par ailleurs, il leur arrive de substituer des mots par des mots semblables, voire même d’en inventer de nouveaux. Par exemple, le mot “ perruque ” peut être dit  “ perruche ”, et “ octogone », “ otragone ”.  La conversation avec une personne atteinte d’un trouble d’accès lexical peut nous paraître imprécise, lente, inefficace et peut parfois faire perdre patience à certains d’entre nous.

 

La difficulté à mettre des mots sur sa pensée, à décrire et  à expliquer clairement son raisonnement, n’affecte pas que la communication orale. La communication écrite en est aussi atteinte. Pour bien des individus dits “ normaux ”, il est difficile de mettre par écrit ses pensées, d’utiliser les mots justes, d’organiser ses idées avec clarté et cohérence, d’appliquer les règles syntaxiques, etc. Pour les individus atteints d’un trouble d’accès lexical, ce défi est décuplé. Leur discours écrit est souvent bien décousu. Les mots sont répétitifs et le vocabulaire, perçu comme pauvre (alors qu’il peut en être tout autre !) puisque la personne manque souvent de temps pour réviser son texte et trouver les bons mots. Les mauvais résultats obtenus en écriture à l’école leur ont appris à être concis. En conséquence, ils perdent beaucoup de points aux questions à développement aux examens de sciences et d’histoire, par exemple. Ce n’est pas faute de maîtriser la matière ! Parallèlement, le trouble d’accès lexical serait étroitement lié à la dyslexie et à la dysorthographie puisqu’il semble aussi affecter l’accès aux mots écrits.

 

Peu importe l’âge et les responsabilités de la personne présentant des difficultés d’accès lexical, elle nécessite du soutien de votre part. D’abord, on se doit d’être patient et lui laisser le temps de trouver ses mots. Il est aidant de la questionner pour l’aider à clarifier son idée. Si le délai de réponse persiste, on peut lui proposer des choix de réponse : on lui met ainsi les mots recherchés dans la bouche ! Reformuler en détail et chronologiquement son récit peut aussi être aidant. De la sorte, la personne peut apercevoir ses incohérences et l’absence de certaines informations importantes. Elle peut ainsi ajuster son discours en vue de mieux se faire comprendre. Bref, que ce soit à l’oral ou à l’écrit, votre bienveillance fait toute la différence.

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À propos de Geneviève Cusson

Orthopédagogue M.A. et directrice générale chez Futé

Une véritable passionnée de pédagogie et d’orthopédagogie! En fondant Futé, cette orthopédagogue d’expérience veut partager sa passion, son expertise et ses connaissances pour rehausser le niveau de littératie et augmenter la réussite scolaire.

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